Michel Sardou
"Les Deux écoles"
J'ai eu l'instituteur qui, dans les rois
de France,
N'a vu que des tyrans aux règnes
désastreux
Et celui qui faisait du vieil Anatole
France
Un suppôt de Satan parce qu'il était
sans dieu.
J'ai fait les deux écoles et j'ai tout
oublié,
La nuit des carmagnoles, la fin des
Assemblées,
Les dieux de l'Acropole et les saints
baptisés.
J'étais des deux écoles et ça n'a rien
changé.
Dans le Lot-et-Garonne,
On bouffait du curé.
On priait la Madone,
Le dimanche en Vendée.
Des cailloux de Provence
Aux châteaux d'Aquitaine,
On chantait la Durance,
On pleurait la Lorraine.
Dans le Rhône et l'Essonne,
On chassait les abbés.
On plantait en Argonne
Des croix de Saint-André.
Des sommets du Jura
Aux jardins de Touraine,
On pleurait la Savoie,
On chantait la Lorraine.
Je veux que mes enfants
s'instruisent à mon école
S'ils ressemblent à quelqu'un, autant
que ce soit moi.
Après ils s'en iront adorer leurs idoles
Et vivre leur destin où bon leur
semblera.
Cette sacrée République qui dit oui,
qui dit non,
Fille aînée de l'Eglise et de la
Convention,
Elle serait bien heureuse que ses
maîtres la laissent
Libre de faire l'amour et d'aller à la
messe.